André-Paul Duchâteau, un Grand Monsieur de la BD
« Le Simenon du 9e Art », comme le qualifie « Le Figaro », est né à Tournai le 8 mai 1925. A seize ans, il publie son premier polar, Meurtre pour meurtre , porté par Stanislas-André Steeman, l’auteur culte de L’assassin habite au 21 . Dans les années 1940, il signe des romans et des nouvelles où la mort est toujours au rendez-vous. Certaines de ses œuvres criminelles paraissent même aux Etats-Unis dans le Ellery Queen Mystery Magazine. L’écrivain se risque dans l’univers de la bande dessinée en 1950, dans les pages du Journal de Mickey. Il a travaillé avec le dessinateur français Tibet dès 1955 sur les aventures du journaliste-détective Ric Hochet, qui paraîtront d’abord dans l’hebdomadaire Tintin. Suivront des dizaines d’albums, à partir de 1963, dont l’action se situe en France ou en Belgique. Outre sa collaboration avec Tibet, qui durera 55 ans, il a travaillé avec Daniel Hulet pour la série Pharaon, avec William Vance, l’auteur de la série XIII ou encore avec Grzegorz Rosinski, le dessinateur de Thorgal. On lui doit encore, en tant que romancier, «La 139e victime», «Mourir à Angoulême» ou «De Cinq à sept avec la mort», récompensé par le Grand Prix de Littérature policière, en 1974. Ne se contentant pas des livres ou de la BD, il a été responsable éditorial aux Éditions Rossel, rédacteur en chef du Journal de Tintin en 1976, directeur littéraire des Éditions du Lombard, responsable de la collection BD Détectives des Éditions Lefrancq en 1989 et scénariste pour émissions de télévision.
Dans une interview accordée en 2010 à Actua BD il révèle ses albums favoris : ceux «qui ont une couleur, une teinte fantastique, que nous avons réalisés ensemble durant les années 1970. C’était également ceux que Tibet affectionnait le plus. Je songe particulièrement au Les Spectres de la nuit ou L’Ennemi à travers les siècles. J’apprécie également Le Monstre de Noirville, qui est un album semi-fantastique. J’aimais beaucoup partir d’une situation classique du fantastique et de malaxer l’intrigue pour arriver à son contre-pied. Le public, et Tibet, exigeaient qu’après avoir été confronté à des faits stupéfiants dans l’intrigue, Ric Hochet trouve une solution cartésienne et logique à l’énigme». Ce qui n’est pas sans rappeler les aventures de Harry Dickson, surnommé le Sherlock Holmes américain, de l’écrivain belge Jean Ray.
Toujours tiré à quatre épingles, le père de Ric Hochet était un gentleman érudit à l’insatiable curiosité. «Le plus important, c’est d’être curieux… disait-il. Et de continuer à s’enthousiasmer comme un enfant !» Après une longue vie de bulles bien remplies, André-Paul Duchâteau nous a quittés, le 26 août 2020, à l’âge de 95 ans.
© Le Lombard/ Charles Robin