À la belle époque où on avait une foi inébranlable dans les progrès des sciences et des techniques, tout irait croissant, croyait-on, jusqu’à l’apothéose : un pays de cocagne. C’est dans ce contexte d’émulation que Camille Jenatzy, un ingénieur et pilote automobile belge établit un record de vitesse sur route avec 105,88 km/h, le 29 avril 1899, à Achères. Il est ainsi le premier au monde à dépasser les 100 km à l’heure. Il accomplit cet exploit à bord d'une voiture de sa conception, « La Jamais contente ». Écologiste avant la lettre, c’est une voiture électrique en forme d'obus ou de torpille, qui lui a permis d’atteindre cette vitesse inouïe pour l’époque. Il devient ainsi l’homme le plus rapide de son temps. Le véhicule est exposé au musée de la voiture de Compiègne (Oise). La voiture était propulsée par deux moteurs électriques de 50 kW au total. Ils étaient alimentés par des accumulateurs Fulmen. Les batteries représentaient près de la moitié de la masse totale de la voiture, soit environ 750 kg. Ce n’est qu'au cours des années 1920 et 1930 que la voiture à essence commence à supplanter la voiture électrique avant de s'imposer totalement.
L’histoire de cet ingénieur, constructeur et pilote de course né à Schaerbeek, le 4 novembre 1868, est celle d’un passionné. Son père, d’origine hongroise, avait ouvert la première manufacture de caoutchouc de Belgique, notamment de pneumatiques. Jenatzy s'intéresse, à la fin de ses études à la faculté de polytechnique, à la traction électrique pour automobiles. Arrivé à Paris, il entreprend de fabriquer des fiacres électriques. Dans ses efforts de publicité, il construit un bolide en forme d'obus, « La Jamais contente ». Ne se contentant pas de son record de 1899, il est aussi le premier à dépasser les 200 Km/h, à Ostende, en 1909, sur une Mercedes, après avoir remporté la quatrième édition de la Coupe Gordon-Bennett, en 1903, en Angleterre. Comme il l’a souvent exprimé : rien n’était comparable à la fièvre de la course. Dans le récit de sa victoire à la coupe il écrit : « Le dernier tour était commencé ; ce n’était plus une course, c’était une chasse ; j’étais le chasseur et de Knyff, parti quatorze minutes avant moi, le gibier ; il fallait arriver treize minutes après lui pour gagner. Ah ! L’ivresse de cette chasse à 90 km/h! »
Fatalité, c’est un accident de chasse qui mettra fin au cours tumultueux de son existence, le 7 décembre 1913, dans la forêt d’Anlier, à Habay-la-Neuve.