Saviez-vous qu’un Gantois a subtilisé les secrets de la filature ?

10/01/2022

On croirait le titre d’un roman d’espionnage, cependant il s’agit d’une affaire qui s’est réellement produite au 18e siècle. Le héros en est Liévin Bauwens, né à Gand en 1769 au sein d’une famille de tanneurs de peaux, il deviendra industriel et espion économique. Suivant que l’on se trouve de l’un ou l’autre côté de la Manche, les jugements qui ont été portés à propos de Liévin Bauwens divergent : tantôt héros national et bienfaiteur de la population de sa ville natale, tantôt capitaine d’industrie peu scrupuleux.

Jusqu’à l’invention par Samson Crompton de la mule-jenny, le filage du coton se faisait à la main à l’aide d’un rouet, un travail lent et nécessitant de nombreuses ouvrières. La machine à énergie hydraulique est capable de filer de 30 à 1.000 fils, fins, parfaitement égaux et très solides, en même temps. Tout à son commerce de denrées coloniales en Angleterre, Liévin, prend conscience de l’importance de la machine dans l’essor de la filature. Dès lors, il achète une machine pour l’étudier. Ensuite il la démonte, cache les pièces détachées dans des caisses de sucre et des ballots de café, qu’il envoie à son frère à Hambourg, dans un même temps il débauche des ouvriers anglais pour la faire fonctionner.

De retour à Gand, en 1800, il ouvre une grande filature mécanique où travaillent 3.000 ouvriers. Douze ans plus tard, 25 filatures et 15 usines de tissage ont vu le jour en région gantoise. Cette industrie, qui devient très puissante permet de rivaliser avec l’Angleterre. Napoléon lui-même est très impressionné par Bauwens, il le nommera d’ailleurs bourgmestre de Gand et le décorera de la Croix de la Légion d’Honneur. Quelques années plus tard, la chute de l’Empire entraînera celle de Bauwens, qui meurt le 17 mars 1822, à 53 ans pratiquement ruiné à cause de ses goûts immodérés pour le luxe et son aversion pour l’économie.