La Provence en Belgique, à deux petites heures de voiture de Bruxelles, à Torgny

30/07/2020

En Belgique, impossible de trouver plus méridional que Torgny. Ce petit village de la Gaume fait comme une saillie dans le territoire français. Il est unique à plus d’un titre.

Traitée cavalièrement et injustement en parent pauvre au cours de géographie, car le grand frère ardennais qui la surplombe au nord était gratifié de toutes les attentions, la Gaume, délimitée grosso modo par Florenville et Chiny à l’ouest, Étalle au nord, le pays d’Arlon à l’est et la région frontalière avec la France au sud mérite pourtant le détour à de nombreux égards.

On peut à peine imaginer plus grand contraste qu’entre l’Ardenne et la Gaume. Son paysage de cuestas est formé de strates issues de dépôts sédimentaires d’épaisseur variable. Roches tendres et dures s’alternent, telles que la marne, le schiste et l’argile, ou encore le grès et le calcaire, contre lesquelles la Semois, la Vire et le Ton viennent buter ou au travers desquelles ces cours d’eau se fraient aisément un chemin. Les versants des cuestas sont donc très logiquement asymétriques : les fronts des collines sont abrupts tandis que les revers sont en pente douce. La douceur du micro-climat gaumais surprend. À Torgny, la température annuelle moyenne est nettement plus élevée et les précipitations notablement plus faibles qu’en Ardenne, grâce au sol calcaire vite réchauffé et à l’altitude plus basse de la région, abritée des vents par le massif ardennais. Les habitants de la Gaume ont la réputation d’être ouverts, spontanés, même un tantinet sans-gêne, par comparaison avec leurs voisins du nord, plutôt réservés et moins loquaces.

Outre la douceur du relief, la générosité du climat et la franchise de ses habitants, d’autres aspects de Torgny contribuent à installer cette atmosphère provençale. La viticulture, sur les versants bien orientés des cuestas. L’architecture aussi, mêlant pierres jaune pâle des maisons au linteau orné parfois d’une date entre 1741 et la fin du 19siècle, toits élégamment couverts de tuiles romaines creuses, façades des fermes au crépi initialement rose (18e et 19siècles) – certaines étant des bâtiments classés – et pas moins de deux lavoirs à la gracieuse charpente (17e et 19siècles). Ou encore une flore et une faune exceptionnellement riches et variées dans les pâturages calcaires de la réserve naturelle Raymond Mayné, où certaines fleurs et herbes évoquent les paysages provençaux : thym véritable, marjolaine sauvage, pulsatille ou les douze espèces d’orchidées qui s’y succèdent au fil des saisons. L’orchidée araignée est un des spécimens les plus particuliers, et sur le territoire belge, on ne la rencontre qu’à Torgny. La région accueille aussi des insectes exotiques, comme la cigale des montagnes et la mante religieuse, des papillons rares tel le sphinx bélier et toutes sortes de reptiles, parmi lesquels le lézard des sables, l’orvet et la couleuvre. Impossible de les citer tous !

Avant de reprendre la route direction nord, plusieurs sites d’intérêt méritent un petit arrêt : la chapelle Notre-Dame de Luxembourg, ainsi que quelques éléments mineurs typiques tels que la fontaine à pompe en fer forgé ou les cinq croix de calvaire, de mission ou de campagne en pierre ou en fer.