La Compagnie des Bronzes à Bruxelles, quand l'art et l'industrie ne font qu'un

03/02/2025

Je suis littéralement passé devant elle des milliers de fois sans jamais vraiment m'arrêter. Jusqu'à ce que je me décide enfin à examiner de plus près la statue équestre du roi Albert Ier dans le jardin du Mont des Arts, près de la gare de Bruxelles-Central. Sur le côté du pied, on peut lire : Cie des Bronzes - La Fonderie - Bruxelles. Voilà qui éveille ma curiosité. Quelle est l'histoire de cette fonderie de bronze bruxelloise ? Et en reste-t-il quelque chose ? 

La révolution industrielle bat son plein dans notre jeune pays durant la première moitié du XIXe siècle. Le canal Bruxelles-Charleroi, qui relie le bassin houiller de Charleroi à Molenbeek-Saint-Jean, dans la périphérie ouest de Bruxelles, est mis en service en 1832. Peu à peu, des usines et des ateliers y poussent comme des champignons. Les principales activités sont alors la bière, le textile et la métallurgie. Le petit village agricole se transforme rapidement en un Manchester belge, Manchester étant la ville anglaise du textile par excellence, où le martèlement et le sifflement de toutes sortes de machines sont omniprésents. 

  

Des statues monumentales 

La petite entreprise familiale Cormann et Compagnie voit le jour en 1854 à la rue d'Assaut, à proximité de la cathédrale des Saints-Michel-et-Gudule, au cœur de Bruxelles. En 1862-1863, elle déménage au 27 de la rue Ransfort à Molenbeek-Saint-Jean. En 1878, elle change de nom et devient officiellement La Compagnie des Bronzes. 

Au début, l'entreprise fabrique et commercialise principalement des objets bon marché en zinc, tels que des lampes. Grâce à l'amélioration des techniques de production, à l'essor de la bourgeoisie et aux commandes nationales et internationales, l'offre s'élargit considérablement au cours des décennies suivantes : zinc pour le bâtiment, objets d'art en zinc, bronze, fer et autres métaux tels que lustres, candélabres, vases et lanternes, meubles, objets de luxe en bronze tels que les cheminées, bronze industriel, tuyaux de gaz, raccords, appareils pour l'éclairage public puis privé au gaz et à l'électricité... sans oublier les bustes, fontaines et statues monumentales qui ornent les rues, les places et les parcs. Afin d'asseoir son identité propre aux yeux de ses citoyens et de l'étranger, la jeune Belgique veut surtout immortaliser dans le bronze de grands noms du présent et du passé : rois, nobles,  hommes d'État, combattants de la liberté, artistes, scientifiques, hommes de lettres, industriels... La statuomanie bat son plein. Des sculptures monumentales ou plus modestes sont réalisées par centaines - ou par milliers - dans l'atelier de sculpture, le hall de fusion, le hall de moulages des bronzes et le hall de montage de la Compagnie des Bronzes. Le carnet de commandes est bien rempli. 

Toutefois, les activités commencent à décliner à partir de 1960 : le bronze passe de mode. En 1979, la Compagnie des Bronzes disparaît. Aujourd'hui, ce site a été reconverti et accueille le Musée bruxellois de l'industrie et du travail - La Fonderie, qui vaut largement le détour.                  

Découvrez vous-même les nombreux chefs-d'œuvre de la fonte du bronze, de la Suède au Canada et de la Bolivie à l'Australie.