Hélène Dutrieu : toujours plus vite, toujours plus haut !
Le 10 juillet 1877, la ville de Tournai voit naître une vraie fonceuse. Elle vivra littéralement sa vie à cent à l’heure, repoussant toujours plus loin les limites. Successivement à vélo, à moto, en voiture et dans les airs, Hélène Dutrieu ne cessera de démontrer sa fougue. Préparez-vous à être époustouflés...
Issue d’une famille dont le père est sans emploi, Hélène Dutrieu connaît une enfance difficile. À seulement quatorze ans, elle quitte l’école sans aucune qualification en poche. Encouragée par les performances et exploits cyclistes de son frère Eugène, de cinq ans son aîné, la jeune fille n’hésite pas une seconde à suivre ses traces et à enfourcher son vélo. Une décision pour le moins révolutionnaire à une époque où les femmes sont censées se consacrer pleinement à leur foyer. Malgré sa frêle silhouette, Hélène se révèle être une as du deux-roues et ne tarde pas à concurrencer Eugène. Elle enchaîne ainsi victoires, records et distinctions. À Paris, par exemple, elle bat le record mondial de l’heure cycliste. Sa popularité atteint des sommets sans précédent. Les hommes considèrent le cyclisme féminin, ce nouveau divertissement à la mode dans une tenue vestimentaire qui laisse un peu plus entrevoir le corps, comme une discipline attrayante. Le mouvement émergent des suffragettes voit en la sportive une figure de proue pour l’émancipation des femmes. Seuls l’Église et le monde médical se montrent critiques vis-à-vis de notre passionnée du vélo.
Hélène est certes acclamée par le public, c’est bien beau, mais les rentrées financières se font attendre. Elle prend donc la décision de passer à la vitesse supérieure et se rend à Paris. Elle y propose un numéro de haute voltige, mais l’Olympia, célèbre temple de la variété, refuse qu’une femme dévale une rampe à vélo sur 18 m et flotte ensuite dans les airs à 70 km/h sur une distance de 20 m avant de terminer sa course sur une plateforme. Et le tout, bien entendu, sans filet de sécurité. Déçue mais déterminée, Hélène prend la direction de Marseille en 1903. Au cabaret Eldorado, elle réalise son périlleux numéro de cirque en faisant fi de la mort. Le public venu nombreux assiste avec effroi à la chute de la sportive, surnommée entretemps La Flèche humaine. Couverte d’hématomes, elle retente la performance le lendemain et réussit son numéro. Plus tard, en Allemagne, elle réitéra cette même cascade, cette fois-ci avec une moto. L’acrobatie se soldera à nouveau par un échec cuisant qui lui vaudra huit mois de revalidation.
Cet accident n’aura toutefois pas eu raison de son inextinguible zèle. Elle a fait le tour de ce que pouvaient lui offrir le vélo et la moto. Ainsi, en 1908, elle jette son dévolu sur une nouvelle discipline : l’aviation. Pionnière dans ce domaine, elle écrit l’histoire et décroche plusieurs records. Durant la Première Guerre mondiale, elle veut s’engager comme pilote de chasse, mais les femmes ne sont pas autorisées à voler. Elle a cependant la chance de trouver une place de volontaire dans un petit avion de reconnaissance non armé.
Elle exerce par la suite les métiers de journaliste et d’éditrice en France. Le 26 juin 1961, Hélène Dutrieu rend son dernier souffle à Paris, à l’âge de 84 ans.
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