Hadewijch : Une biographie qui ne lève pas le voile
Nous ignorons jusqu’aux données biographiques les plus élémentaires concernant Hadewijch, même les dates et lieux exacts de sa naissance et de son décès restent inconnus. Les informations qu’elle laisse filtrer dans son œuvre ainsi que les rares traces exhumées par les chercheurs donnent à penser qu'elle aurait vécu durant la première moitié du XIIIe siècle. Dans son ouvrage « Visions », elle évoque une béguine qui fut sa contemporaine, Aleid, dont le destin s’acheva entre les mains de l'inquisiteur Robbaert. Les archives révèlent que ce dernier exerça son activité entre 1236 et 1239. Dans le même texte, le nom d'Henri V, seigneur de Breda et de Schoten, près d'Anvers, apparaît vers le milieu du XIIIe siècle. Hadewijch était très proche d'Henri V et lui prodiguait des conseils spirituels, ce qui lui valut une renommée internationale sous le nom de « Hadewijch d'Anvers », comme l'indique l'inscription sur la page de garde du manuscrit de Gand. Au XVIIe siècle, le texte suivant a été ajouté : « Lofrede op de zalige Hadewijch van Antwerpen » (Éloge de la bienheureuse Hadewijch d’Anvers). Si cette mention ne constitue en rien une preuve tangible de son origine, elle constitue cependant une indication plausible que la mystique a vécu dans les environs d'Anvers.
Ce qui est certain, c'est qu'elle a été la première femme poète de la littérature néerlandaise. Musicalement accomplie, très instruite, rompue aux textes latins de la littérature mystique et aux chansons françaises d’amour courtois, elle disposait d'un réseau international de contacts, probablement dans les plus hautes sphères. Selon les sources, elle a tour à tour été qualifiée de nonne, d'abbesse, voire même d'hérétique ! Toutefois, les recherches historiques menées par le jésuite Jozef van Mierlo au début du XXe siècle ont permis d'établir qu'il s'agissait d'une puissante cheffe spirituelle à la tête d'un petit cercle de femmes indépendantes à l’aube du mouvement naissant des Béguines.
Son travail
Hadewijch n'écrivait ni en latin ni en français, comme le voulait l’usage à l’époque, mais en langue vernaculaire, à savoir le thyois (diets). Il s'agissait de la variante brabançonne du moyen néerlandais. Cette pratique aussi peut indiquer qu'elle était vraisemblablement issue du Brabant, bien qu'à l'époque cette province englobait les provinces belges actuelles du Brabant flamand et du Brabant wallon et la province néerlandaise du Brabant septentrional. Elle écrivait avec un stylet en bois pointu sur des tablettes de cire, des planches de bois ciré, et plus tard sur du parchemin. Aucun de ses manuscrits n'est connu ou n'a été conservé, seules quatre copies médiévales contenant son œuvre, dont trois provenaient de bibliothèques de monastères ont été préservées. Les corpus contiennent 14 visions, 45 chants (également appelés poèmes strophiques), 31 lettres et 14 poèmes à rimes plates (Mengeldichten).
La mystérieuse Hadewijch demeure donc largement drapée dans les brumes épaisses de cette époque médiévale...